En Guinée, les turbulences politico-judiciaires prennent souvent des tournures spectaculaires, et le cas de l’ancien Premier ministre Dr Ibrahima Kassory Fofana en est une illustration frappante. Ce vendredi 20 décembre 2024, des agents de l’État ont procédé à son évacuation musclée de la clinique Pasteur de Kaloum, où il était hospitalisé. Un transfert qui laisse un goût amer de brutalité et d’arbitraire.
Selon son avocat, Me Sidiki Bérété, le médecin traitant aurait exigé la signature de documents administratifs avant tout départ. Une demande légitime, balayée d’un revers de main par les agents mandatés, qui se sont précipités à rendre compte au procureur spécial de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF). Un zèle exécutif qui soulève des interrogations sur la séparation des pouvoirs et le respect des droits humains.
Cette opération survient dans le sillage d’une décision de la CRIEF, rendue le 11 décembre 2024, ordonnant le transfert immédiat de l’ancien chef du gouvernement vers la Maison centrale de Conakry. Depuis avril 2022, Dr Kassory Fofana croupit en détention préventive, accusé de « détournement de deniers publics, enrichissement illicite et blanchiment de capitaux ».
Cependant, au-delà des accusations judiciaires, c’est le traitement réservé à l’homme qui choque. Doit-on comprendre que l’acharnement judiciaire prime désormais sur le respect de l’état de santé d’un détenu, fût-il un ancien dignitaire ? La justice se veut impartiale, mais ses méthodes actuelles laissent entrevoir des dérives inquiétantes.
Dans une démocratie respectueuse des droits humains, la quête de justice ne devrait jamais emprunter les chemins de la coercition brutale. Le sort de Dr Kassory Fofana transcende son statut d’homme politique : il met en lumière les failles d’un système judiciaire qui semble confondre sévérité et abus de pouvoir. La Guinée mérite mieux.
Saliou Keita